lundi 14 juin 2010

Personnage 1: premier post

6 mois après avoir rejoint le blog de Lews, il serait temps que je poste...

Me suis replongé dans Max Payne récemment suite à une offre sur Steam, et, plongé à nouveau dans l’histoire, me suis demandé pourquoi j’accrochais aux personnages comme ça…

Je suis un MJ. Je suis aussi un joueur ; de jeux de rôles comme de jeux vidéo. J’écris, aussi. Et j’aime bien voir des films et lire des livres. Un point commun de toutes ces activités, ce sont les personnages. Et la création de personnages présente, d’expérience, deux grosses difficultés : créer des personnages intéressants, et créer des personnages qui marquent.

Et, oui, ce n’est pas la même chose. J’ai découvert ça à l’issue d’une partie de jeu de rôle, où j’ai demandé à mes joueurs quels étaient les personnages rencontrés qui les avaient marqués. Les réponses n’ont pas vraiment été celles auxquelles je m’attendais. Ils se rappelaient des personnages que je considérais comme particulièrement intéressants quand je leur en parlais, mais ceux qui les avaient marqués étaient jugés intéressants pour d’autres raisons.

Déjà, c’est quoi, un personnage intéressant ?
-> Ce n’est pas un nom
-> C’est un détail
-> C’est un caractère


Ce n’est pas un nom.

Evidemment, 90% du temps, il va falloir un nom à votre personnage. Mais soyez prévenu, les joueurs ne s’en souviendront pratiquement jamais. Ils l’appelleront, par ordre de préférence :

-> Le nom d’un personnage de série/Dessin animé/film proche, si possible ridicule. J'ai ainsi décrit un personnage majeur de l'univers de Légende des 5 anneaux, un magicien du nom de Yogo Junzo, comme ayant la carrure d'un ours. Chose peu commune. Comment mes joueurs l'appellent entre eux, maintenant?

Dur...

-> Un nom de nourriture proche.
-> Tout autre jeu de mot (si possible tendancieux)
-> « McMachin et son {Insérer ici un objet ou habitude du personnage en question} », s’ils n’ont rien d’autre sous la main (et bravo pour en être arrivé là, déjà !).

Ne vous attachez pas aux noms de vos personnages !

C’est un détail.

Non pas que faire un personnage intéressant est un détail, c’est même crucial pour que les joueurs/spectateurs rentrent dans votre univers. Mais un personnage prend du volume par ses détails, par cette petite chose qui marquera les esprits.

Ça peut être un accent étranger (Vladimir Lem et son accent russe dans Max Payne), une couleur (le Cardinal, habillé en rouge, dans un décor en variations de rouge, fan de vin rouge, etc), un mystère (l’appartenance à une faction inconnue), etc. D’une certaine manière, on pourrait résumer ça par « un mot », un mot qui va définir le personnage. Un mot que vos joueurs partageront pour se souvenir du personnage (« ah, oui, miss cuir violet ! »).

Petit exercice, histoire que vous me suiviez bien. Pensez à quelqu’un que vous connaissez, n’importe qui. Vite ! Et maintenant, demandez-vous si vous arrivez à le qualifier en un mot. Et si quelqu’un à qui vous donneriez ce mot l’associerait à cette personne.

C’est pas forcément facile, hein ? Donc, vous pouvez ajouter : c’est un détail exagéré. Pas forcément jusqu’au ridicule (tout dépend du but du personnage), mais il s’agit ici de vraiment marquer le trait.
Un exemple contemporain (et je m'étonne que Lews n'ait pas encore fait d'article sur ce personnage): prenez Kratos, dans God of War.


Ouais, lui. Un détail intéressant chez lui, c'est sa peau blanche. Étrange, non, pour un guerrier aux trois quarts nus, passant son temps sous le soleil de Grèce ? Ça intrigue. On s'intéresse. Et quand on en apprend la raison, l'explication en est d'autant plus forte...

Il y a des limites, bien sûr. Prenez Nynaeve, dans la Roue du temps. Ses traits marquants sont un caractère de merde, et sa double habitude de tirer sur sa natte, et de croiser les bras sous ses seins. Sauf qu’elle est constamment en train de faire ça (et constamment d’une humeur massacrante). A force, ça en devient lourd.

Faut doser ce détail… Et plus un personnage apparait souvent, plus va falloir avoir la main légère avec.

C’est un caractère.

« Ma femme, comme la tienne, avant de dire que c’était des femmes, on pouvait dire que c’était des caractères… »

Là encore, quels sont les gens de la vrai vie dont vous vous souvenez ? De ceux qui ont un caractère bien défini (mais pas forcément trempé, ou sale). Un personnage, c’est pareil. Du moins, un personnage intéressant. Il a une façon de parler, de se comporter, il utilise certains mots plutôt que d’autres, il a des rêves, des envies et des peurs.

Prenez Planteur J’Me Tranche La Gorge dans Pratchett. C’est un personnage purement secondaire, mais dont le désir de gagner de l’argent est clairement affiché : il vend tout, n’importe quoi, et à n’importe qui, chaque fois qu’on le voit apparaitre. Et sa phrase iconique (« et à ce prix là, j’me tranche la gorge ») n’apparait même pas à chacune de ses apparitions. Elle est utilisée dans les premiers volumes, puis n’est plus que parsemée, histoire de rester un détail intéressant et pas un cliché.


Dans les jeux vidéos, prenez Franky « The Bat » Niagara (Max Payne ; je vous ai dit que j’avais le nez dedans). Personnage secondaire qui n’apparait que le temps de vous mettre quelques bons coups de batte de base-ball. Mais qui parle comme un bon vieux gangster. « I envy yer name ». « Nothin’ wrong with a littl’ laugh ». Non seulement ça, mais monsieur Niagara aime les dessins animés pour enfant, particulièrement Captain Baseball Bat. Il prend son temps avec ses victimes, et est un peu trop confiant en ses capacités. Hop, en 23 secondes, un personnage pas trop plat, un peu cliché (mais y a rien de mal dans les clichés bien utilisés), mais intéressant, vient d’apparaitre !

(L'accent n'apparait pas toujours à l'écrit. Il prononce ça "pleased ta meet'cha")

A l’inverse, prenez Kaufman (Max Payne 2). Kaufman apparait dans un niveau avec les autres Nettoyeurs, et a le droit à une présentation slo-mo avec son nom. Sauf que ? On le descend dans la foulée. Je n’ai jamais su qui était ce nettoyeur. Jusqu’à aujourd’hui, où j’ai fait mes recherches pour les besoins de l’article. Rien en français, j’ai juste trouvé dans un coin obscur du web qu’il était en fait le chef des Nettoyeurs. Ça, c’est un personnage mal introduit…


Bien évidemment, Tous les personnages présents dans une œuvre n’ont pas besoin d’être aussi détaillés. Mais c’est une nécessité pour ceux qui sont importants.

Ok, en espérant que ça vous ai intéressé, prochain coup, on va parler des personnages marquants.

mardi 22 décembre 2009

The wall (another brick in)

Hé oui, me revla avec un vrai post !

Bon, le titre, malgré l'image à droite, je vais pas parler de musique, ni même des Pink Floyd (même si je pourrais). Non, je vais vous parler du Wall, qui est la version épique du Block. Le Writer's Block, s'entend.

Après maintenant trois mois à affronter cette monstruosité vis à vis de jeu de rôle, je me suis dit que formaliser mes pensées à chaud pourrait 1°) servir à d'autres, 2°) me servir a moi même à l'avenir. Here goes.

Bref, vous voulez écrire un scénario de Jeu de Rôle. Quels sont les pièges ?

We don't need no education

Hypothèse : Votre lectorat sait lire.
Conséquence: Votre lectorat a une culture. Elle peut être vaste, réduite, totalement différente de la votre... mais elle existe.
Corrolaire: Chaque chose que vous allez écrire sera passé par le prisme de cette culture.
Exemple, j'ai de suite associé Pink Floyd à "The Wall" en titrant cet article. D'autre auront pensé à Facebook™, d'autre à des parpaings, whatever.

Pourquoi avoir enfoncé cette porte ouverte bien particulière ? Parce que dès lors que vous prétendez écrire un scénario destiné a un autre que vous, vous avez besoin de faire des recherches, de regarder dans notre monde à nous ce qui existe, bref, essentiellement, de vous faire une éducation ciblée sur le sujet du scénar' - et, si la culture des joueurs ciblés ne vous est pas familière, la leur aussi (allez pas écrire pour, par exemple, Shadowrun sans vous être documenté sur ce qu'aime un fan de jeux simulationnistes à outrance.)

Cette culture dopée à l'hormone de Wikipedia™ vous donne quelques avantages à ne pas négliger :
  • Si notre monde est le cadre du jeu, ça vous aidera à mieux ancrer votre scénar' dans le réel. Une fiction se basant dans la réalité, c'est un peu comme un mensonge : les meilleures comportent 90% de vérité. L'enjeu ici est l'immersion des gens qui, eux, savent ce que vous ignorez : essayez d'imaginer un scénar Miles Christi ou un noble fait l'aller-retour Paris-Lyon en une demi-journée...

  • Si le cadre du jeu est imaginaire, connaître le monde réel vous aidera aussi : c'est une réserve d'exemple, c'est familier, c'est confortable. Il ne s'agit pas ici de faire une resucée du monde réel, mais de communication. Exemple, si vous voulez poser une question à quelqu'un qui ne parle pas votre langue, vous utiliserez vos mains, des mimiques, les objets alentours... Bref, vous trouverez un cadre de communication universel, qui n'a rien a voir avec l'objet de votre question, mais qui vous permettra de lui faire comprendre votre idée. Le monde réel, pour un JDR imaginaire, joue ce rôle de "point commun" pour expliquer votre univers, et, petit à petit, y faire rentrer votre lectorat.

Mais, outre cela, connaître votre sujet et votre lectorat vous offre la possibilités d'user et d'abuser de parralèles et de références, qui vous permettront d'utiliser la culture des joueurs à la fois pour rendre votre intrigue plus simple à comprendre, mais aussi pour prendre les gens à contre-pied. Oui oui, le contre-pied, comme dans "feinter de partir a gauche, puis partir a droite pour profiter du temps où il change de direction".

Par exemple, si vous construisez un personnage qui fait vachement penser à Jeanne d'Arc, mais avec des différences de fond, vous obtenez un personnage crédible et original, avec à la fois un ancrage assez solide pour être rapidement compris et assez de différences pour que ca ne soit pas une pâle copie... Et auquel les joueurs réagiront, pour un temps, comme à un clone de Jeanne d'Arc.

Evidemment, faut pas que les ficelles soient trop grosse non plus: le type qui ressemble à Ghandi et qui est en fait un gros salaud est devenu un cliché en lui-même, qu'il faut donc, encore une fois, prendre à contre-pied.

Modran pourrait vous en parler d'avantage, il avait compris ce principe lors de son études sur les PNJs mémorables.

Bref, pour résumer: Knowing is half the battle !


We don't need no thought control

Rien n'est plus faux dans le cas de la conception d'une histoire, et en particulier d'un scénario : domestiquer son imagination pour la faire rentrer dans les cases étroites de l'écrit est sacrément difficile, en particulier dans le cadre d'une publication où vous avez, en plus, des contraintes de signographie (ou, si vous préférez, de longueur de texte).

Après quelques tentatives et m'être manger le mur dans mes dents, quelques "J'ai testé pour vous" :

NE JAMAIS, JAMAIS, JAMAIS
  • Présupposer de ce que fera ou ne fera pas un PJ. Il ne fera JAMAIS ce que vous voulez. JA-MAIS.
    Exemple: "Les PJs n'auront pas le temps de rattraper le PNJ"
    Contre: Vous avez juste pas pensé au moyen qu'ils emploieront.

  • Axer votre scénario sur un état variable d'un PJ.
    Exemple: "Le PNJ ressent la force magique positive du PJ".
    Contre: Il a lancé 50 sorts de Lumière juste avant et n'a plus de magie a ce stade.

  • Supposer que vos PJs feront quelque chose sans raisons. Sans compensation, oui. Sans raisons, non.

  • Axer le déroulement du scénar sur les actions de PNJs. Ce sont les PJs qui font avancer la chronologie, qui sont les moteurs et le centre du scénario. De l'histoire générale ? Peut-être pas. Mais du pan de l'histoire que vous décrivez en scénario ? Ca, oui : le scénar' est censé être LEUR histoire, après tout, pas celle de PNJs

FAISABLE MAIS CASSE-GUEULE
  • Laisser plusieurs situations possibles à des PNJs : ça force à rédiger tout ce qui suit en prenant en compte chaque cas. Les PJs sont imprévisibles alors gardez au moins le contrôle de ce que vous contrôlez.

    Exemple: si vos PJs sont trop boulet et n'empêche pas les méchants de voler le Vieux Codex™ qu'ils sont censés étudier pour continuer le scénar, prévoyez une solution pour que le contenu dudit codex soit quand même accessible.

  • Livrer les PJs à eux mêmes. Ca peut marcher, tout comme ça peut les envoyer a l'autre bout de la planète. Gardez quand même quelques repères pour éviter qu'ils partent aux fraises trop trop vite.
    Exemple : un PNJ pas forcemment sage et puissant mais en qui ils ont confiance, un livre qui leur sert de bible, des évènements de leur vie courante, que sais-je...

Another brick in the wall


Pour conclure, un petit schéma pour guider des tentatives de rédaction scénaristiques :

Avant de commencer :
  1. Trouver le concept du scénario: Ambiance, quelques scènes que vous voulez y voir, sujet, etc... Dans le cas d'un scénario commandé, le concept inclut les contraintes de la publication.

  2. Insérer ce concept dans l'univers du jeu : comment, pourquoi, etc...

  3. Fixez la situation initiale de l'univers concernant votre scénario

  4. Décidez des conséquences du scénario sur les joueurs, puis sur l'univers

Vous avez désormais le cadre de votre scénario. Reste à l'écrire.
  1. Commencez par introduire les joueurs dans le scénario. C'est le plus délicat : si l'insertion des PJs dans le scénar est foireuse ou trop "Vous êtes dans une auberge", le scénar est mal embarqué :-p . Cette étape inclut "trouver les motivations qui pousseront les PJs à ne pas se barrer élever des chèvres au Venezuela plutôt que de poursuivre votre scénar".

  2. Découpez votre scénario en "actes" qui articulent la progression des PJs de la situation initiale jusqu'au final.

  3. Définissez ensuite les articulations de chaque actes, c'est à dire comment les PJs progressent du début à la fin d'un acte.

  4. Des PNJs importants ont du apparaître à ce stade : les ennemis, les personnages clés qui forment une articulation du scénario: définissez les.

  5. A ce stade, vous avez un squelette de scénario assez complet. Il ne reste plus qu'à lui donner des muscles (écrire le scénar proprement dit), et une peau (ambiance, style).
Pour conclure, quelques petits conseils de gestion de l'espace :
  1. Un scénario n'est pas un supplément de contexte : si un tiers de l'espace part dans la description de trucs que ne font pas les PJs, c'est que quelque chose cloche.

  2. Un scénario est censé être lisible le plus aisément possible: intégrez au maximum les détails techniques dans le corps du scénario, et gardez en tête la place qu'ils vont prendre (notamment les caracs de PNJs).

  3. Gaffe à ne pas vouloir trop en faire. Faites très tôt un choix entre un scénario vaste et vague, et un scénario linéaire mais très détaillé/avec une grosse ambiance: vous n'aurez pas la place de faire un scénario vaste ET détaillé.


Et c'est tout !

samedi 19 décembre 2009

Jeez, I got an evil twin...

Non non, ce post ne va pas parler de l'usage des jumeaux maléfiques dans le jeu vidéo ou le jeu de rôle. Il annonce juste le jumelage du blog avec celui de Modran : http://randommiles.blogspot.com/

Et oui, c'est mon jumeau maléfique*: là bas, on écrit en anglais. Bliii !

Attendez donc a voir une part de posts du Modran en VO ici bas (hé oui, il est français, donc la VO, c'est ici) :)

Sur ce, je retourne finir mes textes -_-'



* Et de tout façon, on a un bouc tous les deux, donc peut pas y'avoir de "Good Twin" entre nous.

jeudi 13 août 2009

Iä Iä tus !

Bah ouais, je me la joue Grand Ancien et je roupille un éon ou deux.
C'est pas que j'ai plus rien à raconter, c'est que je suis occupé à le mettre en pratique, en fait :p

A bientot quand j'aurais rendu mes textes ! (RhaaaaAaAaAaaa ptain de signo .o___O)


*couic*

samedi 6 juin 2009

Conclusion sur Persona 4 : Pourquoi c'est fun?

Suite et fin de mes réflexions basées sur Persona 4. J'avais surtout parlé de la narration de l'histoire la fois précédente, je vais donc m'attarder sur le système de jeu proprement dit cette fois.

Pour être honnête, il se trouve que P4 fait partie de ces jeux qui se sont contentés de parfaire des concepts existants : si vous dites "Ha mais ça, ca existe ailleurs !"... c'est normal. Je n'ai vu qu'un seul truc uniques à P4 au cours de la partie, le reste étant des reprises d'anciennes idées avec de sévères améliorations.

Go !

Le background et les règles sont séparées par une cuillère... (et la cuillère n'existe que dans ton esprit)

L'originalité de P4 en terme de système se situe dans l'évolution des actions en combats en fonction du degré d'amitié entre le héros et ses alliés. Les boosts accordés sont si utiles (protection du héros, encaisser un coup mortel, restaurer ses alliés, coup spécial, et finalement booster son Persona) qu'il est difficile d'envisager les derniers combats avec d'autres alliés que ses meilleurs amis. Admirablement adapté au pitch de Persona 4, qui consiste à suivre les aventures d'un groupe d'amis, et où le héros tire son pouvoir de ses liens avec les autres, vous ne trouvez pas ?

Cette petite originalité me rappelle que pas mal de jeux marquants, avaient un système incitant le joueur à respecter l'univers, sans le forcer par des restrictions artificielles.

Le meilleur exemple qui me passe par la tête est La Guerre de l'Anneau, un jeu de plateau basée sur la célèbre trilogie de Tolkien. Au lieu de pousser les joueurs à suivre le déroulement du livre, les règles incitent les joueurs à les viser, tout et en s'arrangeant pour que chaque choix/évènement du livre puisse se justifier dans le jeu. Pourquoi garder Frodon dans la communauté ? Pour pouvoir en sacrifier les membres si Sauron localise l'anneau. Mais pourquoi séparer la communauté, alors ? Ben, pour que les héros qui la compose aille préparer les peuples libres à la guerre. Pourquoi attaquer le Mordor, qui ne peut pratiquement pas perdre militairement ? Pour que le joueur-Sauron utilise ses dés d'actions pour repousser l'assaut plutôt que pour traquer l'anneau. Etc...

Au final, chaque partie permet de former une histoire alternative qui reste cohérente avec l'original, le tout avec un système au coeur relativement simple, et où les nombreuses exceptions sont gérées sous la forme de cartes d'actions piochées chaque tour.


Moralité : Il n'y a pas de rupture entre le background et les règles ! Un bon système de jeu incite les joueurs à s'intéresser au scénario, à respecter son l'univers et à être dans le "ton" de l'histoire (pas forcemment les trois à la fois).

Attention, j'ai bien dit il incite, pas oblige. L'obligation implique une restriction artificielle et peut se révéler frustrante, alors que l'incitation permet à chacun de trouver son amusement tout en favorisant un certain style de jeu.

Ou, pour faire simple: si vous voulez que vos joueurs passent plus de temps à négocier des contrats qu'a tataner la gueule des monstres, arrangez vous pour que ca soit au moins aussi marrant à jouer, plutôt que d'interdire le combat !


Simple sans être simpliste, complet sans être complexe

Un autre point que j'ai apprécié dans Persona 4 est le système de combat proprement dit. Le principe des points faibles est, pour moi, assez proche du Graal de la conception en terme de combat.

La base est simple : quand on attaque un ennemi sur son point faible, ça fait plus mal. Le twist qui fait tout, c'est qu'après ça, la victime tombe à terre, et l'attaquant peut enchaîner avec une seconde attaque. Réattaquer un ennemi à terre sur sa faiblesse l'assome pour un tour, et si tous les ennemis sont à terre, l'équipe entière se rue à la curée pour les achever.

Rien de compliqué, hein ? Regardons les implications tactiques de ce système "simple" :
  • Lorsqu'on découvre un ennemi, on va tester les différentes attaques à la recherche de sa faiblesse.
  • On va varier le groupe suivant les ennemis, pour amener ceux qui ont les Persona les plus utiles (ou les moins boulet) face aux ennemis en cours.
  • Les ennemis peuvent être de vraies menaces, vu qu'il existe une solution (couteuse) pour les abattre rapidement: mettre tout le monde à terre et les achever avec une attaque de groupe.
Pas mal, non ? Mais là où ça devient vraiment sympa, c'est que ce système sert, encore une fois, l'ambiance du jeu. Les points de magie partent vite, et les ennemis étant considérablement bourrins, ils sont généralement utilisés pour guérir le groupe après chaque combat. Sortir le grand jeu est généralement viable sur une très courte durée, après quoi il faut mettre un terme à l'exploration du donjon pour ce jour, et revenir le lendemain après une bonne nuit de sommeil... Et les donjons sont toujours en temps limité.

On est donc souvent dans une situation où les points de magies doivent être économisés: on ne peut donc pas y aller à fond sur chaque combat... Et hop, avec ce système simple, on retrouve la dynamique des shonen dont s'inspire la série des Persona (sérieusement, y'a même des mangas pour chaque jeu !) : dès que ça tourne mal, le héros, qui a accès a un large panel de pouvoir via sa capacité unique a avoir plusieurs Persona, a fréquemment accès aux sorts pour exploiter chaque faiblesse, et peut donc facilement dégommer un groupe d'ennemi entier à lui seul, en cas d'urgence. Vive le One More.

Soutien

Je dois dire que la présence d'un personnage de soutien est la plus grande surprise quand on ne connait pas Persona 3. C'est, encore une fois, un lien entre le background et les règles. Si les héros sont synchronisés, qu'ils ont une vue claire du champ de bataille, arrivent à fuir, ont une "mini map" pour se repérer, etc... c'est pas parce qu'on est dans un jeu vidéo. C'est parce qu'ils ont un allié avec des pouvoirs spécialisés pour ça qui leur file des infos. Un détail, peut être, mais qui renforce l'immersion, un peu comme les barres de vie et les hologrammes de Dead Space : presque tout ce que le joueur voit est explicable dans l'univers du jeu.


Conclusion

J'ai mis longtemps à finir cet article, et depuis, j'ai commencé à jouer à d'autres jeux - mon expérience avec P4 est donc un peu "passée", et j'ai donc pas forcemment dit tout ce que j'avais à dire sur le sujet. M'enfin, j'ai couvert l'essentiel de ce qui m'avait marqué.

Pour résumer, en terme de système de jeu, je retiens P4 pour trois choses:
- le fait qu'il renforce l'histoire à chaque occasion
- le fait qu'il permette de jouer intelligemment ou bourrinement avec un système simple à comprendre
- le fait qu'il essaye d'être intégré au mieux dans l'histoire du jeu.


Probablement trois choses à retenir pour la suite.

mardi 2 juin 2009

Personna 4, première conclusion: La théorie de l'IHJ

C'est parti pour tirer quelques conclusions de Personna 4. Je vais commencer par une petite réflexion provoquée par la qualité du chara design de P4.

Comme a mon habitude, je vais enfoncer quelques portes ouvertes, mais que vous voulez vous, les fermées, ca fait mal à l'épaule, alors...


Théorie de l'immersion : Rappels

Il n'y a pas photo, une bonne partie de l'intérêt de P4 provient de la facilité avec laquelle on se plonge dans une histoire pas forcemment sexy de prime abord.

L'enfonçage de porte ouverte commence: un joueur n'est pas dans l'univers du jeu : il est tranquillement sur un canapé, un pad à la main. Pour l'impliquer le joueur dans un jeu, on dispose essentiellement de deux angles d'attaques :

- l'aspect ludique : si le joueur s'amuse comme un petit fou, il rentrera plus facilement dans le jeu. Ca se traduit donc essentiellement par l'aspect "système" du jeu : prise en main, système, trucs funs, etc..

- l'aspect scénaristique : à l'instar d'un film ou d'un livre, la narration de l''histoire d'un jeu peut captiver un joueur en elle même.

Intéressons nous à cet aspect. On se heurte à nouveau au problème de distanciation, cette fois entre le joueur qui regarde l'intrigue et son personnage qui la vit. Des tonnes de gens très intelligents ont appellé la solution de ce problème la suspension of disbelief et indiquent des tonnes de techniques d'écriture pour la créer, toutes très bien pensées.


La théorie de l'Interface Histoire-Joueur (IHJ)

Cependant, pour ma part, je vois le problème sous un autre angle: pour provoquer l'immersion du joueur réel dans l'histoire virtuelle, il lui faut un medium par lequel l'émotion suscitée par l'intrigue peut transiter jusqu'au joueur. Notamment, via un ou plusieurs personnages auquel le joueur peut réagir. C'est ce que je me suis amusé a appeler les IHJ, ou Interface Histoire-Joueur.

Dans un livre ou un film, c'est le boulot des personnages principaux et du grand méchant. Laissons de côté de Grand Méchant un moment : dans un jeu vidéo ou un JDR, les personnages centraux sont, ben, joués. Ca peut être problématique, puisque les joueurs sont notoirement doués pour faire tout, sauf ce qu'on attend d'eux. Et dans un Jeu Vidéo, recevoir un impact émotionnel d'un perso que vous avez fait mourir 100 fois, c'est pas simple...


Etre un Héros et un IHJ ?

On peux tenter d'appliquer la recette du ciné, en traitant le héros comme un PNJ que le joueur dirige de temps à autres.

La méthode est simple: il suffit de prendre le contrôle du héros pour les étapes importantes de l'intrigues (en JV, ca donne des cut scenes où on regarde son perso agir), et limiter l'influence qu'a le joueur sur son avatar (options limitées dans la résolution des péripéties du jeu; dialogues rédigés traduisant la personnalité du héros, en laissant aucune ou très peu d'alternatives au joueur pour orienter son comportement).

Le héros, au lieu de devenir l'instrument du joueur dans le monde du jeu, devient un personnage à part entière auquel le joueur doit essayer de s'identifier, et qui est un véhicule de l'émotion de l'histoire à part entière.

Cette technique marche : elle est même la norme dans le jeu vidéo, d'ailleurs; les rares jeux où elle n'est pas employée ont un personnage qui porte souvent le sobriquet de "silent protagonist" (puisqu'il ne dit rien et ne montre aucune personnalité, laissant au joueur le soin d'imaginer ce que dit réellement le héros. Les Shin Megami Tensei, et donc par extension Persona 4, souscrivent à ce principe). Alternativement, une méthode batarde est employée par les RPG genre Fallout ou Arcanum, qui offrent un vaste panel de réponse variant selon les caracs du protagoniste et les choix passés du joueur : on est donc a mi-chemin entre un perso "scénarisé" et un perso totalement contrôlé par le joueur.

En JDR, on retrouve également cette technique, par exemple, dès que le MJ intervient sur un PJ; par exemple par le biais d'actes passés qu'il a oublié et où le MJ a toute latitude de faire agir le personnage du joueur comme bon lui semble. Je l'ai employée, et elle marche très très bien aussi.

Mais vous savez quoi ? Je la trouve un peu casse-gueule, parce qu'on risque de nuire à l'immersion du joueur, qui sentira que son personnage n'est pas réellement son personnage. A employer intelligemment, donc, et en conjonction avec les autres méthodes


Les PNJs-IHJ


Ce que Persona 4 m'a appris, c'est que le rôle d'IHJ pouvait être tenu avec brio par un petit groupe de personnages secondaires récurrents, qui, en interagissant avec le joueur, transmettent diverses façon de réagir à l'intrigue... et on s'attache à ceux qui nous touchent le plus. Dans tout les cas, il y a de fortes chances que l'impact émotionnel soit communiqué d'une façon ou d'une autre au joueur, ce qui en fait une technique plutôt fiable.

D'ailleurs, tout les rôlistes vous le diront: un bon MJ interprète bien ses PNJs !

L'inconvénient majeur de cette technique est la quantité de boulot colossale nécessaire pour créer un pool de personnages pouvant servir de medium avec le joueur, et, dans le cas du JDR, à les interpréter. On se retrouvera pour cette raison fréqumment avec un pool d'environ 3-4 persos récurrents jouant ce rôle.

En offrant une équipe de neuf personnages très développés liés à l'intrigue principale, plus une dizaines d'autres persos qui la vivent de l'extérieur, P4 a fait très très fort à ce niveau. Il est logique de s'immerger dans l'hisoitre avec un tel nombre de vecteurs émotionnels de qualité à disposition.


Le Villain-IHJ


Dernière forme de vecteur émotionnel nécessaire à une intrigue, le Grand Méchant. Encore une fois, j'enfonce une porte ouverte en disant que si le dernier boss, l'ennemi, le salaud que le joueur tente de contrer... n'évoque qu'un vague sentiment de fatigue parce que le joueur court après une petite frappe depuis le début de la partie, c'est non seulement qu'il y a un grave problème avec ce Villain, mais qu'en plus qu'il y a un risque énorme que le joueur sorte brutalement de l'intrigue à la toute fin de l'histoire !!!

Pour donner un exemple, Farenheit est un excellent jeu qui souffre de ce problème de "dernier boss minable", ce qui provoque une fin en douche froide des plus agaçantes (et en plus, c'est mal expliqué).



Et je crois que c'est tout pour aujourd'hui.
Je parlerais des conclusions sur l'aspect ludique la prochaine fois.

samedi 30 mai 2009

Persona 4, ou une petite leçon de game design

L'histoire commence dans un Micromania, avec un vendeur persuasif qui me convainc de jeter 30€ dans un jeu qui me disait rien: Persona 4, dont j'avais entendu parler comme un croisement entre un Dating Sim et un Dungeon RPG où un groupe de lycéen explorait un monde contenu dans des TVs.

Dis comme ça, ça sonne pas génial, hein ?

Bah y'a des fois ou on est agréablement surpris. Et Persona 4 est probablement l'une des meilleure surprise vidéoludique que j'ai eu depuis Dragon Quarter.


Y'a forcemment des trucs à prendre dans ce jeu, et vu que je l'ai fini la semaine dernière, c'est parti pour disséquer la bête?

Sensation de liberté : le retour

Okay, dans mon deuxième article, je parlais de la liberté. J'aurais pu rajouter un chapitre le système d'intrigue en un an des Persona. Dans P4, le héros arrive sur les lieux de l'intrigue début Avril 2011. Il le quittera exactement, un an plus tard. Dans l'intervalle, nous allons le jouer chaque jour de l'année (en théorie), qu'il soit au lycée, en week-end, en sortie scolaire, en train d'affronter des monstres, etc...

Passé les premiers jours très linéaires qui posent l'intrigue, on obtient le contrôle de ce que notre personnage fera de ses soirées et week-ends. On peut librement aller dans des clubs, trainer avec des amis, travailler pour gagner de l'argent, étudier pour avoir des bonnes notes, etc...

Mais l'intérêt de cette semi-liberté se révèle lorsque l'intrigue commence. Sans spoiler, au cours de l'année et de l'intrigue, des gens seront enfermés dans une sorte de monde parallèle que notre brave lycéen est le seul à pouvoir explorer (même si il partage rapidement ce pouvoir avec ses amis pour avoir des alliés au combat). Le joueur devra donc fréquemment aller sauver d'innocentes victimes dans des donjons périlleux. Et c'est là où ca devient intéressant: à partir du moment où une personne est kidnappée, le héros n'a que jusqu'au prochain jour de brouillard pour la sauver (cherchez pas pourquoi, c'est expliqué dans le jeu). On rentre donc dans une phase plus tendue, où on consulte constamment la météo pour savoir le temps qui reste avant l'échéance, tout en continuant à jongler avec études, amis, boulots... De plus, les donjons sont *VRAIMENT* dangereux, et arriver jusqu'au bout demandera généralement plusieurs raids, donc plusieurs jours dans le calendrier du jeu.

Le double impact du temps - qui rythme l'avancée de l'histoire donne vraiment l'impression de maîtriser son personnage et d'être acteur dans l'histoire.


Petite leçon de character design

Depuis que j'ai fini P4, je me suis acheté Persona 3 qui est réputé très sympa aussi, et j'y joue en ce moment. Pourquoi cette disgression ? Parce que la première chose qui m'a choqué entre les deux jeux est le manque de profondeurs des PNJs de P3.

Ou, à bien y réfléchir, à l'immense boulot qui a été fait sur ceux de P4.

Petit point express sur le système des Social Links des Personna. Pour schématiser, dans cette série, la magie vient des Personna, sorte de Pokemon dark&corrupt lié à un Arcane du Tarot. Au cours du jeu, le héros peut sympathiser avec des PNJs associés aussi aux Arcanes : plus la relation entre les deux est forte, plus les Personna liée à l'Arcane de cette personne seront puissantes.

Avec un système pareil, il est évident que les 21 personnes que l'on sera amené à fréquenter au cours du jeu ont une certaine importance : certains seront les équipiers qui se battront aux côtés du héros, d'autres seront des camarades de classes, des gens rencontrés par hasard, des proches...

La où Personna 4 brille vraiment, c'est par ses personnages. Qu'ils soient agaçants, amusants, émouvants, sympathiques ou non, ou juste drôles, chacun des PNJs qu'on est amené à fréquenter est toujours attachant, bien rendu, et avec une personnalité un peu fouillée qu'on apprend à connaître au fur et à mesure qu'on approfondit nos liens avec eux. Leurs réactions sont crédibles, cohérentes, et parfois innatendues pour les héros d'un jeu (sérieusement).

Le plus intéressant pour moi est l'effet d'une relation très proche avec un camarade d'armes : l'attachement se traduit par des réactions spéciales en combat, dont les plus intéressantes sont celle d'aider un allié en difficulté ou de protéger le héros en encaissant un coup à sa place. Passé un point, j'avais vraiment l'impression de voir un groupe d'amis au combat : ils s'aident à se relever, se jettent devant le héros en hurlant "NOOOOON !"... Je m'étais rarement autant attaché à des personnages dans un jRPG, et je pense qu'au delà de leur personnalité fouillée et de leur mini-intrigue personnelle, ce comportement "amical" en combat les a rendu nettement plus "authentique", et, donc, plus appréciables.


De l'effet subtil d'une thématique

L'un des point que j'ai grandement sous-estimé dans P4 en le commençant, c'est l'importance de sa thématique. Le jeu commence en rabâchant que le héros va "chercher la vérité", "dévoiler la vérité", que ses amis seront ses "yeux pour contempler la vérité", etc...

Attention, je commence à spoiler.

Loin d'être des paroles en l'air, cette insistance est simplement là pour préparer les joueurs au final du jeu : ce n'est pas moins de deux fausses pistes qui peuvent venir égarer un joueur qui ne cherche pas à résoudre toute l'intrigue. La première est assez visible; la seconde, elle, est très perverse, et je n'aurais jamais imaginé avoir loupé un bout de l'intrigue si je n'étais pas tombé sur le début de la vraie fin par hasard !

Tout ce que je peux dire sur le sujet, c'est que la vraie fin se mérite et qu'elle explique toutes les zones d'ombres et les sous-entendus de l'intrigue. Ce faisant, elle transforme bien des points que je trouvais naze dans l'histoire en quelque chose de cohérent et avec plus de profondeur que prévu. Marquant.

Les classiques de Shin Megami Tensei

Ca, on aime ou on déteste : le principe des combats des Shin Megami Tensei est assez bien fichu. En résumé, c'est simple: chaque monstre a ses forces ou faiblesses, attaquer les faiblesses d'un ennemi ou mettre un coup critique permet de ré-attaquer dans la foulée ("One More !"), la lumière et les ténèbres sont forcemment des instant-kill, et il y a des attaques physiques spéciales qui coutent des points de vie plutôt que de magie.

La série des Personna, en plus, intégrent la notion de "Down": lorsqu'on attaque une faiblesse ou qu'on colle un critique, la victime tombe à terre, et c'est open-bar: plus d'esquive possible. Si les héros mettent tout leurs ennemis à terre, c'est la curée: toute l'équipe se rue sur l'ennemi pour lui mettre une dérouillée, le tout dans un magnifique nuage de fumée type cartoon.

P4 est allé plus loin, avec la notion de "Dizzy" (frapper plusieurs fois un ennemi à terre le sonne, l'empêchant de se relever au tour suivant) et la possibilité de se défendre contre le premier coup à venir, ce qui limite les dégâts et évite de tomber.

Ajoutez à cela des ennemis coriaces, et vous comprendrez que les combats dans un SMT, et donc dans un Persona, sont relativement tactiques et intéressants à mener.



Ca devrait suffire pour ce soir. Je tirerais des conclusions sur P4 un autre jour.